C.Cass. 14 juin 1836
Les faits:
Monsieur B possède un château le domaine de Farzac, il y a de grandes étendues à exploiter et pour cela il loge Monsieur C avec sa famille dans un bâtiment agricole indépendant du château (ce n’est pas un simple détail). Et bon, vu qu’il est un peu chaud de la bite le Monsieur B, il fricote avec la voisine, la fille de Monsieur C. Souvent nus dans un champ, parfois chez lui, dans une grange… Enfin bon, partout. On peut dire que Jeanne est le PQR de Monsieur B.
Mais forcément, un mec avec un château ça attise les convoitises des petites bourgeoises du coin. Et vu qu’il vaut mieux une bourgeoise qu’une paysanne, Monsieur B délaisse Jeanne pour se marier avec Madame B. Et puis il visite tout de même quelques fois sa charmante voisine dans sa petite grange. On se laisse pas abattre.
Jusqu’au jour où Madame va s’en apercevoir et va faire la gueule. Elle va ester en justice Monsieur pour obtenir une séparation de corps.
La procédure :
Dans le cas de cette décision, il n’y a aucune précision sur la première instance, on ne connaît pas les motifs du tribunal pour avoir débouté Madame. Il me faudrait aller chercher dans les archives limousines… Mais on peut imaginer que le tribunal a utilisé l’article 339 du Code Pénal pour ne pas accepter la demande de séparation de corps en faveur de Madame.
Ce qu’il faut savoir : d’après l’article 339 du Code Pénal, l’adultère de l’homme n’est pas punissable, sauf dans le cas ou il vit avec sa maîtresse sous le même toit que sa femme. La bonne ambiance.
Mais pour le coup, le détail plus haut n’étais pas anodin : il n’y a aucun accès direct entre le domicile de Jeanne et celui de Monsieur.
Donc Madame, véner’ d’être prise pour une conne, va interjeter appel pour obtenir sa séparation de corps et elle va l’obtenir le 21 mai 1835 par une décision de la cour d’appel de Limoges. Si l’article 339 du Code Pénal ne rend pas Monsieur coupable d’adultère, l’article 220 du Code Civil sur la séparation fait référence à l’injure grave. Madame n’était pas au courant de la relation entre Jeanne et son mec avant leur mariage dans leur domicile, ainsi le mariage ne tient pas lieu de réconciliation et Madame peut utiliser les faits antérieurs au mariage comme griefs contre Monsieur.
La réconciliation, qu’est ce que c’est ? Elle peut être tacite ou officielle, il s’agit pour le couple d’oublier chacune des fautes de l’autre et de ne pouvoir jamais les ressortir contre lui comme motifs d’acte de justice. Par contre, tu peux lui reprocher tous les matins au réveil de t’avoir trompé.
Donc, certes Monsieur B n’a pas trompé sa femme sous son propre toit, mais il existe des circonstances aggravantes, comme sa relation antérieure avec Jeanne ou encore le fait qu’elles soient voisines, qu’elles se fréquentent. Le communauté d’existence entre les deux femmes est une injure grave.
Ainsi, Madame obtient la séparation de corps, et monsieur, véner’ à son tour, forme un pourvoi en cassation pour faire casser l’arrêt de la Cour d’appel de Limoges et annuler la séparation de corps.
La Cour de Cassation, dans un arrêt du 14 juin 1836, rejette le pourvoi de Monsieur en donnant les mêmes motifs que la Cour d’appel de Limoges sur la communauté d’existence comme injure grave.
Explications :
Si le mari trompe sa femme, il n’a pas intérêt à le faire sous son propre toit, sinon il est enclin à une amende dérisoire mais surtout à la demande de séparation de corps ou de divorce de sa femme et il n’a que peu de chance de s’en sortir innocent. Puis ne va pas me dire qu’il peut pas aller pécho ailleurs que dans sa propre baraque. S’il a la présence d’esprit de le faire un peu plus loin que sous les yeux de sa meuf, faut aussi faire en sorte qu’elle ne fréquente pas la maîtresse. L’injure grave, le fléau des mecs mariés.
Ce qu’il faut retenir :
Coucher avec sa voisine c’est comme coucher avec son collègue de boulot. Y a toujours un moment ou tu te fais pécho.
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