Cass. Crim. 27 avril 1854
Ceci est un arrêt de la Cour de Cassation du 27 avril 1854, c’est l’histoire d’une petite fille qui aurait sans doute préféré être aveugle. Ou peut être pas, mais bon, ca doit pas être rigolo de voir ses parents coucher ensemble.
- Les faits
Madame Voisin, ouvrière, est mère d’une jeune fille, Philomène. Philomène a 13 ans, en pleine crise d’adolescence, avec des boutons et les cheveux gras. Dans l’arrêt de jurisprudence rien ne nous dit si Mme Voisin est veuve ou divorcée, mais en tout cas, on sait quelle couche avec Monsieur Charbonneau.
Jusque là, rien d’anormal. J’veux dire, les gens ont le droit de coïter ensemble (même les non-catholiques, et oui, la société évolue). Le problème c’est ça (si tu veux pas cliquer je t’explique brièvement. Les familles ouvrières vivent dans 20m² et tous dorment sur le même lit).
Aussi, la petite Philomène est témoin de chaque relation sexuelle entre sa douce maman et Charbonneau. Génial. GE-NIAL.
On peut aisément supposer que la gamine n’est pas allée frapper à la porte du maire ou d’un juge pour se plaindre. Vu que ça se passe dans un espace privé, il y a deux théories possibles: Soit les voisins ont une vue plongeante sur la couche de la famille et sont allés porter plainte, soit la petite Philomène en a touché deux mots à ses voisins/copains/au travail/à l’école et les voisins, parents des copains, ou n’importe quel adulte conscient du truc* est allé porter plainte.
*Le truc c’est l’attentat à la pudeur
- La procédure
Le 16 mars 1854 le tribunal Supérieur de Napoléon de Vendée juge coupables Madame Voisin et Monsieur Charbonneau. Bon, comme d’hab pour les gens pas satisfaits, il y a un pourvoi en cassation. Les faits sont clairs, le couple a fait du sexe devant un enfant qui ne dormait pas. Le Code Pénal prévoit dans l’article 334 que « Quiconque aura attenté aux moeurs en excitant, favorisant ou facilitant la débauche ou la corruption de la jeunesse de l’un ou de l’autre sexe au dessous de l’âge de 21 ans, sera puni d’un emprisonnement de six mois à deux ans et d’une amende de cinquante francs à cinq cents francs » et l’alinéa deux précise « si la corruption a été excitée, favorisée ou facilitée par leurs pères, mères ou autres personnes chargées de leur surveillance, la peine sera de deux ans à cinq ans d’emprisonnement et de cents francs à mille francs d’amende. »
Ok, c’est cool, Voisin et Charbonneau prennent chacun deux ans d’emprisonnement et 300Fr d’amende. Mais il se trouve qu’au XIXème siècle, l’article 334 du Code Pénal a connu genre mille revirements.
- Explications
Pourquoi des revirements? Bin parce que l’article n’est pas clair du tout (d’ailleurs il traite aussi de la prostitution). Le principal problème se pose avec le mot « habituellement ». Qu’est ce que l’habitude en ce qui concerne l’attentat aux moeurs ? Une fois devant plusieurs enfants ? Plusieurs fois devant le même enfant ? Plusieurs fois devant plusieurs enfants différents ?
C’est compliqué, il a été question pendant la Troisième République de pénaliser dès la première fois sur un seul enfant, mais Sadi Carnot, conscient de la précarité et de la promiscuité dans lesquelles vivent les familles ouvrières refuse ce projet de loi. Beaucoup trop de couples honnêtes seraient inculpés. Du coup, la notion d’habitude a été virée du code pénal. On va pas s’encombrer. L’idée est alors de réprimer l’intention coupable de pervertir l’enfant.
- Ce qu’il faut retenir
On baise pas devant les enfants, merde ! Imagine, t’es tranquille entrain de regarder Plus Belle La Vie ou La soirée de Noel (avec Arthur, les confettis et tout) en famille, et tes parents pris d’une passion soudaine se déshabillent et …. Bref, moi j’arrête d’imaginer.
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ils vont en prison ok… et elle devient quoi dans tt ca l’enfant ? Oo
Selon les familles, on envoyait les enfants dans des couvents ou des parents lointain. Loin du scandale. Dans le pire des cas, orphelinats.