Ce n’est pas un ange, c’est un fantôme ! Versailles est hanté !
Une nuit de l’année 1695, alors que Louis XIV vient de se coucher, il dort déjà à poings fermés. Il n’y a plus un bruit dans le château. Enroulé dans ses draps de soie, le Loulou doit s’imaginer dans les bras de la plus langoureuse de ses maîtresses, quand tout à coup, le Roi est réveillé par une voix venue de nulle part. Et puis selon ses dires, une lueur pâle et froide d’un visage se penche près de lui. Louis reconnaît alors Marie-Angélique de Fontanges, son ancienne maîtresse décédée depuis quatorze ans.
D’une voix maintenant vive et aiguë, l’ancienne favorite reproche au Roi de l’avoir si vite oubliée alors qu’il déclarait qu’elle était la femme qu’il aimait le plus et lui avait promis l’amour éternel. Marie Angélique est déçue d’avoir été mise de côté par la Montespan et la Maintenon.
Enfin, dans une ultime phrase, elle annonce que la morue Montespan l’a empoisonnée et elle conjure au roi de se débarrasser de la guenon Montespan afin d’alléger sa future peine au purgatoire, où elle l’attend avant de rejoindre à deux le paradis et l’éternité.
Bon, au petit matin, Loulou retrouve la Montespan, lui fait un bisou sur le front et mange ses tartines. Il n’a pas été complètement déboussolé ni convaincu par cette apparition nocturne. Mais alors, qui est cette Marie Angélique Fontange ?
Qui est Marie Angélique ?
Marie-Angélique de Scorailles de Roussille est issue d’une famille de nobles blindés de thunes de l’Auvergne. Le château de Cropières, c’est eux. Alors qu’elle est jeune, jolie et encore vierge, Marie-Angélique est envoyée en 1678 au service de Monsieur, frère de Louis XIV, et sa femme, Madame, la Palatine. Il s’agit des premiers pas de la jeune fille à Paris et à la Cour de Louis XIV. Grande classe quand même. Très très très rapidement, la meuf va taper dans l’œil du Roi. Pour se faire remarquer, il va porter des chapeaux, des diamants et aussi des rubans aux couleurs préférées de la jeune fille. Bref, le mec prêt à tout pour pécho de la donzelle. Et il y parvient, évidemment.
La Montespan, favorite du roi, n’aime pas trop trop ce petit manège, mais elle se dit que c’est qu’une passade. Loulou vient de fêter ses 40 ans, il nous fait une petite crise. Que le premier mec de quarante ans qui n’a pas tenté de serrer une petite jeune lui jette la première pierre. En 1679, soit à peine un an après son arrivée à la Cour, Marie-Angélique devient officiellement maîtresse officielle du Roi. La Montespan manque de s’étouffer avec son orgueil.
La guerre des maîtresses
Les courtisanes adorent la petite nouvelle du Roi, aussi, elles guettent le moindre de ses looks pour le recopier. Marie Angélique, c’est un peu la blogueuse mode du XVIIème siècle, mais elle ne s’appelle pas Betty. Par exemple, un jour où elle galope durant une partie de chasse à Fontainebleau, une branche décoiffe Marie Angélique. Peu importe. Elle accroche négligemment un ruban qui lui tombe sur le front plutôt que sur les épaules, comme c’est la mode à l’époque. Ni une, ni deux, les courtisanes adorent et vont porter cette coiffure pendant plusieurs décennies en Europe. Sauf la Montespan, qui trouve cela de très mauvais goûts et la Maintenon qui préfère garder son chignon bien serré. Allez, les meufs, détendez-vous. Soyez patientes, vous allez bientôt le récupérer votre Loulou. Mais pas tout de suite.
Louis XIV est raide dingue de la jeune fille, il va lui accorder une pension de 25 000 écus par semaine ainsi que le titre de duchesse en 1680. La Montespan, qui est toujours un peu nerveuse, et surtout terriblement jalouse, va aller jusqu’à ravager les appartements de sa rivale et faire d’atroces crises de jalousie au Roi. Mais ça tombe plutôt mal, Marie Angélique est enceinte, elle est en train d’asseoir son importance à la Cour et le Roi est heureux de la naissance à venir.
Mais, le malheur des uns fait le bonheur des autres, aussi, lorsque l’Auvergnate accouche d’un fils mort-né, la Montespan voit déjà la faille du couple. Et ça ne va pas tarder, rapidement après cette mauvaise naissance, Louis XIV est lassé. Ce qu’il prenait pour de la fraîcheur et de la grâce enfantine chez Marie-Angélique, c’est en fait qu’un manque d’esprit. Elle est creuse comme un panier la pauvre fille…
Délaissée, Angélique va se retirer à l’abbaye de Chelles quelque temps. Pendant ce temps, Loulou reste insensible à la Montespan et se rapproche de plus en plus de Maintenon.
Marie Angélique se fait larguer par Loulou
Lors de son séjour chez les bonnes sœurs, la duchesse de Fontanges a été victime d’une tentative d’empoisonnement. Elle avait dans sa chambre six flacons avec de l’eau minérale prescrite par son médecin pour retrouver des forces. Depuis son accouchement, Marie Angélique ne cesse de perdre du sang, elle est très fatiguée. Or, dans certains de ces flacons, on a pu retrouver du poison. Tiens donc. Qui est-ce qui a été mêlée à l’affaire des poisons ? La Montespan. Bien vu. Or, rien ne prouve que c’est elle. Mais quand même… Bref.
Marie-Angélique va bien, mieux même, elle s’est bien reposée et va revenir à la Cour. D’ailleurs, en mars 1681, elle fait une nouvelle fausse-couche (le Roi lui rendait visite, fréquemment). Mais là, sa santé se gâte, vraiment. Elle a une très forte fièvre, elle agonise chaque jour un peu plus.
Loulou décide d’aller rendre visite à la pauvre Auvergnate… Lorsqu’il la voit… Bin, c’est pas franchement beau à voir, elle est pâle comme la mort. Aussi, Loulou verse-t-il quelques larmes… Dans un dernier soupir, Marie-Angélique, duchesse de Fontanges, dit au Roi « Je meurs contente puisque mes derniers regards ont vu pleurer le roi ! ». La maîtresse du Roi est morte dans la nuit du 27 au 28 juin 1681. À l’âge de vingt ans.
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- En savoir plus : Vice et Versailles d’Alain Baraton
- Gallica : Série de portraits de Marie-Angélique de Fontanges
- On remercie Nina Luec, Frisotte pour ses illustrations, on va voir son blog et on aime sa page FB.