J’aime bien le parfum, et je pense que personne n’y est insensible. Il y a ceux qui en mettent le matin, d’autres uniquement avant de sortir pécho de la meuf ou du keum, ou encore ceux qui détestent ça. Mais comment en est-on arrivé à se parfumer ? Voici l’histoire du parfum à travers les siècles et quelques recettes, comme ça, pour faire plaisir.
Antiquité
Le parfum a joué un rôle important dans la vie religieuse mais aussi profane dès les civilisations antiques. Par exemple, en Egypte et en Grèce, on brûle des essences aromatiques en offrande aux divinités. On dit que le parfum exalte la beauté et la puissance.
D’abord on utilise les baumes et les résines, puis petit à petit, avec la perte de la religiosité, on va faire évoluer les supports et les substances odorantes. Aussi, on va utiliser la fumigation, les huiles, les liqueurs fermentées, et on va associer le parfum à la beauté féminine grâce à Cléopâtre qui utilise le parfum en onguents ou en bains parfumés.
Le moyen-âge
Au VIème siècle, Fortunat, êveque de Poitiers raconte qu’au cours des festins, on se couronne de « chapels » de roses, et on parfume les salles d’odeur de rose. Pour faire genre ce sont les chapels qui sentent. Mais en fait non. Ici, une recette de parfum de maison, ci-dessous quelques astuces.
Dans les récits de la Table Ronde, le parfum apparaît avec la fée Mélusine qui fait jaillir de sa baguette des embaumements « sources de sommeil délicieux ».
Le parfum reste réservé à l’élite. Genre le pécore, il sent la chèvre et la bouse et puis c’est tout. Allez, au mieux, le fumier, ou la boue. Bref, faut avoir du pognon pour sentir bon. Et puis, il y a les Croisades, et les Croisades n’ont pas juste faits plein de morts, non. Enfin, beaucoup quand même. Mais elles ont surtout servi à ramener des trucs cools en Europe, genre la glace ou encore de nombreux parfums, avec les épices, tout ça. Et petit à petit, ça se diffuse partout, on trouve de l’essence de rose venue d’Orient, des eaux parfumées d’Espagne et finalement, c’est de moins en moins cher, alors le pauvre aussi à le droit de sentir la rose et le jasmin.
Les maitres-gantiers
En 1190, le roi Philippe Auguste accorde ses premiers statuts à la corporation parisienne des maitres-gantiers. Pour avoir le droit d’exercer, il faut payer 39 deniers, et ils sont obligés de vendre dans leurs boutiques ou sur leurs étals aux Halles. Pas ailleurs. En 1357, le roi Jean II le Bon confirme le privilège des maitres-gantiers. Personne d’autre ne peut vendre du parfum.
Les mecs utilisent la méthode de la distillation avec des alambics aux formes variées, en plomb, verre, ou en terre cuite. Les parfums à la mode sont la rose, la violette, ou encore le chypre (à base de chêne). Pour se parfumer, il faut utiliser une petite éponge.
Bon, j’espère que ton petit cerveau se pose quand même la question : Pourquoi est-ce-qu’on appelle un mec qui fait du parfum un maître-gantier ? Eh bien, c’est tout simple, au XIème siècle, les eaux parfumées sont surtout utilisées pour fabriquer des bourses, des pourpoints et surtout des gants. Ça permet de colorer les cuirs.
La Renaissance
Enfin, il faut attendre le XVIIème siècle pour que les mecs puissent se faire appeler maitres-parfumeurs. Les meilleurs se retrouvent à Grasse et à Montpellier depuis le milieu du XVème siècle. Et puis c’est la Renaissance hein, alors il se passe des trucs un peu chelou, genre à Montpellier, on aime beaucoup l’astrologie. Donc les plantes doivent être cueillies à heures fixes, dates fixes, selon les signes du zodiaque. Bin ouais. Y’a aussi un mec, Pierre de Paris, qui mélange jus de crapaud, sang de chien et excréments d’oiseaux dans ses parfums.
On utilise aussi le parfum comme médicaments, genre l’Eau de la reine de Hongrie offerte à Charles V, c’est une eau-de-vie et fleurs de romarin macérées puis distillées. Il faut en boire quelques gouttes tous les matins.
Autre chose, on ne trouve pas uniquement du parfum sous forme liquide. Le musc et l’ambre se trouvent sous forme solide, dans des petites boites rondes, souvent en ivoire qu’on appelle « barillet ». Ou encore, dans des bijoux, les pommes d’ambre, qui deviendront pommandres.
La ville de Grasse
Grasse devient aussi un lieu réputé pour la tannerie (le cuir), aussi le lentisque et le myrte donnent aux peaux leur couleur verte. Tu me diras, le cuir vert, c’est quand même de super mauvais goût, mais Grasse devient vraiment the-place-to-be lorsqu’on veut vendre du cuir.
Quand on veut vendre des épices et des plantes aussi d’ailleurs. Du coup, les apothicaires s’installent à Grasse, notamment Ermantari Rossanti. En 1474, on fait l’inventaire de sa maison dans le manuscrit « Carreria Recta », on y trouve du poivre, de la cardamone, muscade, thym, sang de dragon (une sorte de patience dont on utilise les racines pour faire des médoc), coloquinte, labdanum, antimoine, mais les parfums vraiment vraiment à la mode sont la fleurs d’oranger, la lavande, ou encore le musc et castoreum.
Après 1800
Le parfum reste majoritairement un truc de riches, de bourgeois, de privilégiés, du coup pendant la Révolution, le parfum tombe en disgrâce. Et puis avec le Consulat et l’Empire, le parfum va retrouver sa place dans la société. L’impératrice Joséphine aime les senteurs exotiques alors que Napoléon ne porte que de l’eau de Cologne.
Le XIXème siècle va être la période de renouveau du parfum. Avec l’industrialisation de la société et les grandes avancées, le parfum va aussi y passer. La chimie moderne et les découvertes scientifiques vont changer la manière de travailler des parfumiers. Le luxe est à la mode, et le parfum est un art. Aussi, avec les molécules de synthèse, on peut reproduire les odeurs les plus rares sans avoir besoin de la matière première. Et on va expérimenter les mélanges et autres senteurs improbables. On peut se le permettre. Les affiches de publicités pour les parfumeries se multiplient, et vu que je suis sympa, en voici quelques unes : 1 – 2 – 3
Désormais, on utilise le parfum sous forme de sels de bain, de sachets pour les armoires à linges, ou encore sous forme de pastilles à brûler sur un brule-parfum. Le mieux reste le vaporisateur en verre, inventé en 1870 par Brillat-Savarin. Ca va être l’essor des grandes marques, qu’on connaît tous. D’ailleurs, Guerlain va recevoir le titre de « Parfumeur Officiel de Sa Majesté » par Napoléon III. Et c’est plutôt classe.
Ensuite, les créateurs de vêtements vont vouloir faire des parfums assortis à leurs lignes. C’est le cas de Gabrielle Chanel qui sort sa fragrance en 1921. Célèbre N°5. Et puis Rochas, Lanvin, Dior, Nina Ricci…
Une recette à faire chez toi
Recette de l’eau avec laquelle on doit se laver les mains avant de passer à table selon le Ménagier de Paris :
« mettez bouillir de la sauge puis couler l’eau et faites refroidir jusqu’à plus que tiède. Ou mettez de la même manière camomille ou marjolaine, ou bien encore romarin et cuire le tout avec de l’écorce d’oranges. Et aussi feuille de laurier sont bonnes »
En fait, le mec, il te donne juste la recette d’une tisane… Donc, si tu veux pas te laver les mains avec, tu peux le boire…
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- Le bourgeois l’apothicaire et l’artisan : vivre en Provence au Moyen-Age, Marie Christine Grasse
- Le Ménagier de Paris (Gallica)
- Recettes et astuces pour un parfum de maison (Gallica)
- Un brule-parfum (Gallica)
Pauline a déjà travaillé sur le parfum, viens lire !
Bonjour,
Je vous informe que le mot « keum » est interdit par la brigade anti « vieux ringards » depuis 1994.
Cordialement,
renard des bois, en direct des fourrés
Mais enfin, je me revendique vieille ringarde, c’est un secret pour personne !
Bonne journée dans les fourrés monsieur Renard !
je le savais….