Mais au fait, le réveillon de la Saint-Sylvestre ou du Premier de l’an, comme vous préférez, c’est quoi ? Pourquoi ? Comment ? L’année dernière, je vous expliquais qu’en réalité, ce qu’on fête le 1er janvier (approximatif) c’est la circoncision de Jésus Christ. Oui oui. Durant une grande partie du Moyen-Age, le Premier de l’an était le premier mars, ou pour Pâques. Aujourd’hui, je vous raconte comment on fête cette circoncision au Moyen-Age : c’est la fête des Fous, autrement nommée : la fête des Innocents (qui ne le sont pas), ou sous-diacres (comprendre saouls-diacres).
La fête des Fous : c’était quand ?
La fête des Fous peut être célébrée soit le jour après Noël, soit le premier janvier, ou encore pour l’épiphanie. Les mecs, ils sont super souples sur les dates. Lors de cette fête, les domestiques devenaient les maîtres, les maîtres des domestiques, et les ecclésiastiques : des poches à vinasse. On rigolait bien au Moyen-Age ! Cette fête a perduré durant de longs siècles. Les premières traces datent du Xème siècle, et les mecs se sont battus pour essayer de la faire disparaître en 1255, 1441 et au XVIème siècle. D’abord en vain, puis ça a fonctionné…
La fête des Fous : une drôle de cérémonie
Juste après Noël, donc, lorsque les journées sont courtes et qu’il caille sa mère, la populace a besoin de distractions, la fête des Fous se déroule dans une chapelle, une église, une cathédrale et même dans les monastères. Tout le monde se déguise, il n’existe plus de différence entre les curés, les évêques, les paysans et les autres.
Tout le monde se grime, se déguise, picole et danse. On raconte qu’on ripaille directement sur l’autel, du boudin, de la saucisse et du pinard. On joue aux dès, aux cartes et on roule des pelles à tout le monde. Les mecs chantent même des obscénités. On rigole quoi. Ensuite, il est temps d’élire le roi des Fous, l’évêque, ou le Pape des Fous : il est assis sur le siège épiscopal, porte les vêtements dignes de son statut, ainsi que tous les ornements nécessaires. Il balance des bénédictions dans lesquelles il souhaite à l’assistance des maux de dents, teigne, et autre crise de foie. En gros, on se moque ouvertement de la religion, on remet en cause le système et on picole. Beaucoup. Le tout déguisé.
A la fin des bénédictions, l’assemblée sort de l’église pour faire un cortège et traverse la ville. Les plus coquins miment des coïts survoltés sur les murs des maisons, d’autres se jettent dans les ordures, enfin, beaucoup d’entre eux montrent leur bite ! Il est également possible d’entrer chez les gens et si une personne (ou deux, ou trois, ou…) est trouvée dans un lit, il est possible de lui mettre une fessée, puis de repartir. Sauf si, sur invitation courtoise, l’un des deux veut plus. On peut aussi se jeter des fruits et légumes pourris, on se chamaille et parfois on se bat… Mais attendez, ça ne vous rappelle rien ?
Les tentatives d’interdiction
A plusieurs reprises, les religieux ont souhaité interdire cette fête. C’est vrai, ça fait désordre… Mais ça n’a pas été facile ! Le premier à avoir tenté est Maurice, évêque de Paris, mort à la fin du XIIème siècle. Il a essayé dans un premier temps de supprimer la fête des Fous. Ça n’a pas marché, alors il a promis des amendes à tous les clercs qui s’y mêlaient. Ça n’a vraiment pas marché.
En 1265, nouvelle tentative, archevêque de Sens, Odon, ne veut pas interdire la fête mais il ne veut pas qu’on y participe. Bon… Pas convaincant. En 1441, des évêques font appel à la faculté de Paris pour se faire entendre, ils demandent à ce que la fête des fous soit condamnée. On entend la requête mais non, toujours pas… Alors Charles VII se joint à eux pour faire pression et malgré les mesures prises, la fête se produit quand même. Quand ça veut pas hein… Au XVème siècle, on prend les choses autrement, on ne demande pas l’interdiction, seulement qu’on arrête de trop se foutre de la gueule de l’Église et qu’on évite de se foutre à poil… Pas plus efficace.
Finalement, c’est avec l’apparition du protestantisme que la fête des Fous va progressivement disparaître. Bin ouais, les protestants se foutent clairement de la gueule des cathos avec leur fête de débiles dégénérés… Alors pour faire classe, on fait des trucs moins idiots, ou on ne le fait pas dans les églises. La fête des Fous disparaît des lieux publics mais perdurent dans les lieux privés. C’est p’t’être encore pour ça qu’en 2015, y’a des gens pour organiser des soirées déguisées les soirs de réveillon !
Image : Gallica
On savait rigoler à cette époque 😀
ce n’est pas aussi l’ancêtre des carnavals?
post très sympa, intéressant et imagé dommage pour le style si familier, j’ai l’impression d’être retourné dans la cour du collège… :/
J’aime bien ce style « familier » moi, je pense que ça peut accrocher un public qui d’ordinaire ne s’intéresse pas spécialement au Moyen-Age (et de manière générale à l’Histoire) en considérant qu’il s’agit de quelque chose de ….barbant 🙂