Pour peu qu’on s’intéresse à la monarchie, à la vie à Versailles ou à Louis XV, on a tous entendu parler du Parc aux cerfs, ce lieu lubrique de Versailles où Louis XV vient user et abuser de petites filles pour assouvir ses désirs les plus fous. Eh bien c’est faux. Enfin, en partie. Oubliez tout ce que vous pensiez savoir, la plupart de ces idées ne relèvent que du fantasme, la réalité est tout autre et je vous la présente aujourd’hui.
Louis XV, un roi débauché ?
Non. Ou en tout cas, pas plus qu’un autre souverain de cette époque. Les filles présentes au Parc aux cerfs sont effectivement jeunes, ce sont des adolescentes (environ 14 ans). Si Louis XV aiment les jeunes filles vierges ce n’est pas parce qu’il kiffe les déniaiser et que ça lui apporte un sentiment de supériorité, non, c’est parce qu’il a très peur des maladies vénériennes et qu’une fille vierge ne peut pas lui refiler la syphilis par exemple. Les petites maîtresses du roi sont souvent issues de la bourgeoisie et la noblesse et non des quartiers sombres de Paris pour la même raison, il est plus facile de contrôler l’hygiène d’une fille de la cour plutôt que des bas fonds du royaume.
La réputation d’un Louis XV violent et grand consommateur de petites filles est fausse. D’ailleurs, du fait de son tempérament morose, le Roi recherche de la douceur et se trouve être très mal à l’aise en présence de jeunes filles farouches.
En revanche, vous me direz aisément « mais Marine, si Louis XV se tape des gamines loin d’être majeures, on doit parler de pédophilie ». Alors, oui avec nos yeux du XXIe siècle, mais il est difficile de juger des situations d’un autre siècle avec des notions actuelles. Au XVIIIe siècle, il est coutume d’avoir des relations avec des jeunes filles, et la notion de consentement féminin est peu existante. Si le père souhaite offrir la virginité de sa fille au Roi, il le fait et elle n’a pas son mot à dire. C’était juste normal à l’époque, ce qui ne veut pas dire que ce n’est pas condamnable.
Le rôle de la marquise de Pompadour
Louis XV marié à Marie Leszczyńska, voit la porte de la chambre conjugale lui être fermée en 1745. Faut dire qu’après dix grossesses menées à terme, elle n’en peut plus d’être grosse et décide de fermer l’accès à son utérus au roi et donc à son lit. C’est à ce moment-là que le roi rencontre Jeanne Annette Poisson, la future marquise de Pompadour. Leur relation dure cinq ou six ans, ensuite elle prend une autre tournure. La passion est terminée, Louis XV ne veut plus coucher avec la marquise de Pompadour, en revanche, il l’estime beaucoup et aime sa compagnie. Leur relation devient alors platonique. De son côté, la Pompadour souhaite garder son privilège de maîtresse officielle alors elle décide de fournir à son ancien amant de nouvelles petites maîtresses, belles, jeunes, fraîches mais pas dangereuses.
La marquise de Pompadour assiste Dominique Guillaume Le Bel, le premier valet du roi, pour trouver des jeunes filles. Après avoir sélectionné une potentielle petite maîtresse, Le Bel invite la jeune fille à dîner à Versailles. Pendant ce temps, le Roi profite d’une ouverture dans le mur pour observer sans être vu. Si le physique et la compagnie de la prétendante lui convient alors il demande à Le Bel qu’il la conduise dans un de ses boudoirs « le trébuchet ». Et PAF. Ensuite, la petite maîtresse, encore appelée petite sultane, est installée au Parc aux cerfs et le roi ne s’y rend absolument jamais mais il fait venir ses maîtresses à Versailles lorsqu’il le souhaite.
La Pompadour veille, si une des filles prend un peu trop d’importance dans le cœur du roi, elle lui organise un mariage en grande pompe avec une dot directement prélevée dans les caisses royales. Mais alors ? Qui étaient ces filles et comment vivaient-elles ?
Les filles du Parc aux cerfs
Il n’y a pas eu des centaines de jeunes filles au Parc aux cerfs, on estime entre 1 et 5 filles par an soit entre 10 et 50 petites maîtresses pour Louis XV. Les sources ne s’entendent pas et pour cause, pendant longtemps le Parc aux cerfs a été caché du grand public. Louis XV ne voulait pas que les activités du Parc aux cerfs s’ébruitent, alors il est assez difficile de connaître ce qui s’est réellement passé, ce qui a causé par la suite un grand scandale et de nombreuses emmerdes à Louis XV.
Parmi les petites maîtresses célèbres, on peut parler de Jeanne du Barry, la seule qui n’était pas vierge, celle-là même qui a donné son nom à un potage au chou-fleur (je vous donne la recette dans le tome 2 de Raconte-moi l’Histoire) tant apprécié par Louis XV dont elle est devenue la maîtresse officielle après leur rencontre en 1768. Mais aussi Marie-Louise O’Murphy, une irlandaise qui a connu une idylle royale de plus de trois ans et est aussi passée entre les griffes de Casanova, ou encore Anne Coupier, encore appelée Mlle de Romans, avec qui le roi a eu un enfant Louis Aimé de Bourbon, seul des enfants illégitimes de Louis XV à vivre proche de la cour, à Passy, et à porter son nom. Les autres, comme Agathe-Louise, née de Marie-Louise O’Murphy, ou Agnès-Louise et Anne-Louise nées de la petite maîtresse Marguerite-Catherine Haynault, mais encore Agnès-Lucie et Aphrodite-Lucie, filles de Louis XV et Lucie Madeleine d’Estaing et Benoît-Louis le Duc, fils de Louise-Jeanne Tiercelin ont été élevés à la campagne sous des noms d’emprunt.
On estime entre quinze et vingt le nombre d’enfants naturels (dont huit issus des petites maîtresses) plus les dix légitimes avec son épouse, ça en fait des gamins pour le roi Louis XV, et encore, on ne sait pas tout !
La vie au Parc aux cerfs
Les premières petites maîtresses de Louis XV ne logeaient pas encore au Parc aux cerfs mais bien au trébuchet, un petit appartement où le roi continue de les recevoir après le déménagement au Parc aux cerfs. Le problème du trébuchet c’est que c’est trop proche de la cour, des intrigues et du pouvoir et Louis XV ne souhaite pas que ses maîtresses prennent pas d’une manière ou d’une autre à ses affaires alors il tient à les tenir géographiquement à l’écart dans un quartier de Versailles du nom de Parc aux cerfs car Louis XIII, son arrière-grand-père, faisaient un élevage de gibier à cet endroit-là. La vie est plutôt douce au Parc aux cerfs, tout est parfaitement meublé et le personnel est au petits oignons de tout le monde, mais les petites maîtresses s’y emmerdent. Faut dire qu’elles se succèdent les unes les autres mais jamais elles ne cohabitent. Ça aurait pourtant été un peu cool d’avoir une compagnie autre que la femme de chambre, celle de service et le laquais qui sert à les conduire à Versailles.
Mais le Parc aux cerfs n’est pas une maison de passe, l’idée n’est pas de piocher parmi les petites sultanes, comme on pourrait le croire, mais bien d’offrir à une jeune fille, maîtresse du roi, un toit, un cadre de vie confortable et quelques biens. Lorsqu’une petite maîtresse rejoint le roi à Versailles, ce n’est pas uniquement pour une partie de jambes en l’air endiablée, Louis XV aime leur faire la conversation et apprécie leur compagnie. Comme c’est le cas de Marguerite-Catherine Haynault qui passionne le roi par son talent de peintre. Elle a d’ailleurs réalisé un portrait de Louis XV.
Des filles mariées et bien dotées
Qui voudrait épouser une jeune femme qui a eu des enfants (bien qu’ils soient du roi) et qui n’a pas d’argent ? Personne, évidemment ! C’est pourquoi, lorsque Louis XV se lasse de l’une de ses petites maîtresses ou si la Pompadour estime que la jeune fille prend un peu trop de place, il n’existe qu’une seule solution. Il faut doter la maîtresse du roi et lui trouver un époux convenable. Souvent, les hommes choisis ont une excellente réputation mais leur manque d’argent les poussent à accepter le mariage pour la dote. Tout le monde en sort plus ou moins gagnant, la meuf se trouve mariée est n’a pas à entrer dans les ordres ou vivre dans la misère, et le mec gagne suffisamment d’argent pour oublier que son épouse n’est pas son premier choix. De plus, les bâtards du roi restent à la charge du royaume et le nouvel époux ne débourse pas un centime pour leur éducation. C’est en pleine connaissance de cette issue financière heureuse que de nombreux parents de la bourgeoisie ou petite noblesse poussent leurs plus belles filles dans les bras de Louis XV.
Au début des années 1770, le Parc aux cerfs n’est plus habité.
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Mais tu peux aussi acheter les livres dont la lecture est très divertissante !
Et si tu veux en savoir plus sur le sujet, je te conseille le livre sur Louis XV intime et les petites maitresses ou encore Le parc aux cerfs de Michel Peyramaure, le siècle de Louis XV, par Pierre Gaxotte.
Bonsoir! J’adore vos histoires et la façon dont elles sont racontées. Je souhaiterais signaler une petite coquille qui s’est glissée dans l’article.
« Le Bel… après avoir sélectionnÉ » .
Bonne continuation !
Très intéressant article ! J’ai cependant trouvé une coquille: « est n’a pas à entrer dans les ordres ». Ce ne serait pas plutôt « et n’a pas à entrer » ?
Je me permets car sinon j’aime bien votre façon d’écrire
Faute de frappe ‘la meuf se trouve mariée ET n’a pas à entrer dans les ordres ou vivre dans la misère,’ qui n’enlève en rien la superbe de vos articles et du blog…Je Kiffe!
»…Louis XIII, son arrière-grand-père »’ !! ne serait-ce pas plutôt son arrière-arrière grand père ?
Ceci étant dit, j’adore vos articles, continuez le plus longtemps possible
Très intéressant! Quelle vie et quel sacré budget qu’ils avaient quand même
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Le vrai nom de la marquise de Pompadour, ce ne serait pas plutôt Jeanne Antoinette Poisson ? (au lieu de Jeanne Annette Poisson comme écrit dans l’article)
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Est-ce qu’il est nécessaire de vous exprimer avec autant de vulgarité ?
Adorable article . <3