Jules Brunet, le vrai dernier samouraï

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Si vous avez vu le film le dernier samouraï, vous connaissez l’histoire de ce mec, joué par Tom Cruise, qui part en mission au Japon et bien, figurez-vous que le scénario est très très inspiré de la vie du militaire français, Jules Brunet. Sauf que ça a été américanisé à mort. Forcément. Aujourd’hui, je vous raconte la vraie histoire du dernier samouraï.

Jules Brunet, ses débuts dans l’armée française

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Jules Brunet, avant de devenir le dernier samouraï naît à Belfort le 2 janvier 1838, son père, Jean-Michel est vétérinaire dans l’armée et sa mère Laure Rocher, l’élève dans la discipline. Avant sa vingtième année, Jules Brunet est admis à l’école Polytechnique et il fait ensuite l’École d’application de l’artillerie et du génie avant d’intégrer le 3e régiment d’artillerie. Il est brillant, très brillant puisqu’il se classe 4ème à sa sortie d’école en 1861. Rapidement, Brunet se fait remarquer par ses supérieurs, notamment lors de sa première expédition au Mexique sous Napoléon III. A son retour, il reçoit la légion d’honneur et on l’intègre dans la Garde impériale. Et puis finalement, en novembre 1866, on l’envoie au Japon et c’est au pays du Soleil Levant que la vie de Jules Brunet va véritablement commencer.

L’ambiance au Japon en 1866

Pour comprendre le rôle de Jules Brunet au Japon, il faut bien saisir le petit bordel politique japonais à cette époque.

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Depuis le début de l’époque Edo en 1600, c’est un shogun qui dirige le pays alors que l’empereur, lui, a seulement des fonctions spirituelles. Le système japonais est hiérarchisé et rigide, afin de garantir la paix au Japon. C’est un système féodal, des seigneurs qu’on appelle daimyos, vivent une année sur deux avec leur famille à Edo, alors capitale du pays et lorsqu’ils partent, ils doivent laisser leur famille, comme otage… Pour être sur qu’ils reviennent. Clairement, c’est pas fun fun la vie. De plus, le pays est complètement replié sur lui-même, c’est ce qu’on appelle sakoku. Le shogun n’accepte que quelques relations diplomatiques et commerciales avec ses voisins la Corée et la Chine. Si un occidental se pointe sur le territoire, il risque la peine de mort. C’est une vraie peur de l’étranger qui se développe et le courant nationaliste est pendant plusieurs siècles très important.

Finalement, à partir du milieu du XIXème siècle, le shogun accepte d’entrer en relation avec les Américains. Faut dire qu’en 1854, Matthew Perry arrive sur les côtes japonaises avec différents navires de guerre et le shogun a trop peur d’une guerre qu’il ne pourrait pas gagner, alors il signe -par peur et sans consulter l’empereur- la convention de Kanagawa qui ouvre les ports de Shimoda et Hakodate aux Américains puis aux Russes, Anglais, Néerlandais et Français.

Les affrontements internes au Japon

La population se partage en trois au Japon, ceux qui sont contre l’ouverture (les xénophobes), ceux qui y sont favorables et puis ceux qui n’en ont rien à cirer parce qu’il en existe toujours, mais on ne va pas parler d’eux. La noblesse japonaise des régions de l’ouest du pays, notamment Chōshū, tosa et Satsuma, se sent heurtée par la convention du Shogun avec les Etats-Unis d’Amérique et elle aurait aimé qu’il demande l’avis de l’empereur alors que les daimyos du reste du pays soutiennent plus ou moins le Shogun et l’ouverture vers le monde.

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A partir de 1866, des batailles s’organisent et les trois régions de l’ouest s’unissent à d’autres pour préparer un coup d’état pendant que l’armée du Shogun reçoit les premiers conseils de Jules Brunet. Mais pour le Shogun Tokugawa Yoshinobu, le pire a lieu le 3 janvier 1868, c’est la restauration du système impérial avec l’empereur Mutshuhito  et la fin de son règne du dernier Shogun. Mais il ne va pas se laisser faire.

Le rôle de la France

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« Cette mission a pour objet, vous le savez, d’apporter autant que le comportent les mœurs et le degré de civilisation du pays, le concours de notre expérience administrative et militaire à l’organisation et à l’instruction de l’armée japonaise.
Je n’ai pas besoin de vous dire que le système d’organisation et d’instruction militaires que vous serez appelés à appliquer aux troupes du Taïcoun, ne saurait consister à copier servilement ce qui se fait en France, mais bien à tirer parti des aptitudes et des habitudes militaires du pays, en les améliorant par l’introduction de l’esprit de discipline et par des connaissances qui les feront entrer graduellement dans la voie du progrès. »

Depuis l’ouverture des relations diplomatiques et commerciales avec le Japon, la France désire aider le pays à s’industrialiser (c’est toujours un bon moyen de faire du pognon) et soutient donc l’armée du shogun en envoyant le capitaine Chanoine et ses hommes, notamment Jules Brunet qui va séduire les samouraïs. Non seulement il en impose par son gabarit, il mesure 1m85 mais en plus il a de véritables  talents artistiques, il manie les mots et les crayons aussi bien que les armes, d’ailleurs, le Shogun lui autorisera un portrait.

« Brunet, averti par le ministre, avait apporté ses albums et le Taïcoun lui fit dire qu’il désirait qu’il fît son portrait et qu’il poserait si c’était nécessaire. Toujours accompagné de ses crayons et de ses albums, Brunet peint plusieurs aquarelles, réalise croquis et études du Shogun Yoshinobu Tokugawa, dont un portrait dans la position debout, ce qui ne s’était jamais fait dans l’histoire du pays, l’étiquette l’interdisant. Brunet, bien entendu, se récrie et prie Sa Majesté de continuer ses affaires, de sorte que la conférence continue entre le ministre, le capitaine et le Taïcoun, Brunet, en grande tenue, dessinant dans un coin entouré de hauts dignitaires… »

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Dans le film le Dernier samouraï, on voit les mecs se bastonner avec des sabres, mais allo quoi… En réalité, ils avaient des armes à feu, certains combats ont même été menés aux canons… Donc les Français ne sont pas arrivés avec les armes, ils ont juste mis au point des tactiques mais elles n’étaient pas suffisantes face à l’armée de l’empereur. Le 27 avril 1868, la France se retire du Japon. Sauf le capitaine Brunet.

Jules Brunet devient le dernier samouraï

« J’ai l’honneur de vous remettre ma démission du grade de capitaine ; je déclare qu’à partir de ce 4 octobre 1868, je renonce aux prérogatives de la position d’officier d’artillerie dans l’armée française. »

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Les troupes françaises quittent le pays et la France annonce sa neutralité. Alors que la mission Chanoine est annulée, Brunet refuse de quitter le pays et d’abandonner le Shogun, les samouraïs et le combat qu’il mène d’instruire tous ses frères d’arme. Il écrit alors a son supérieur Chanoine, mais le mec refuse sa démission, il ne veut pas laisser Brunet au Japon. Il est alors considéré comme déserteur… avec toutes les conséquences que ça entraîne, genre, il risque la mort quand même.

Art. 235 – Est déclaré déserteur à l’étranger, trois jours après celui de l’absence constatée, tout militaire qui franchit sans autorisation, les limites du territoire français, ou qui, hors de France, abandonne le corps auquel il appartient.
Art. 226 – Est puni de mort tout chef militaire, qui, sans provocation, ordre ou autorisation, dirige ou fait diriger une attaque à main armée contre des troupes ou des sujets quelconques d’une puissance alliée ou neutre.
Art. 228 – Est puni de destitution tout chef militaire, qui, sans provocation, ordre ou autorisation, commet un acte d’hostilité quelconque sur un territoire allié ou neutre.
Art. 228 – Est puni de mort tout chef militaire, qui prend un commandement sans ordre, ou le retire contre l’ordre de ses chefs.

Finalement le ministère Français le place en congé sans solde pendant un an quelques mois plus tard pour régulariser sa situation sans créer de problème à l’un de ses meilleurs hommes. Pendant ce temps, Jules Brunet organise la riposte du Shogun et ensemble ils fondent le 25 décembre 1868 la République d’Ezo sur l’île de Hokkaido, mais elle ne sera que de courte durée car au mois de juin 1869, l’armée de l’empereur débarque sur les côtes et assiège les 800 hommes du shogun. Brunet a le temps de s’enfuir et d’échapper aux représailles et à la torture des vainqueurs. Il va finalement rentrer en France. 

Le retour en France

Lorsque Jules Brunet est contraint de quitter le Japon pour la France, il reçoit un blâme pour ingérence dans les affaires politiques d’un pays étranger et on le suspend, enfin, c’est ce que tout le monde croit. En réalité, on lui demande juste de ne pas pavoise, de ne rien raconter de sa mission et il est nommé directeur adjoint d’une manufacture d’arme. A aucun moment sa nomination est inscrite dans le Journal Officiel. Mais peu importe, il reste en France et rencontre une femme qu’il épouse rapidement et c’est le capitaine Chanoine son témoin.

En 1870, la guerre touche la France et le capitaine Brunet se retrouve au 8ème régiment d’artillerie et il reçoit la Légion d’honneur et rejoint le gouvernement pour lutter activement contre la Commune de Paris. Une carrière politique calme et tranquille s’en suit mais lorsqu’en 1895, le Japon sort d’une guerre éprouvante avec la Chine, le pays du soleil levant n’oublie pas son samouraï et l’élève au grade de « grand officier du Trésor sacré du Mikado ». Et apparemment, c’est la grande classe. Jules Brunet, le dernier samouraï décède le 12 août 1911, on peut le retrouver au cimetière du Père-Lachaise.

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